Le cadre juridique de l’immunité des chefs d’État étrangers
Définition et fondements de l’immunité personnelle
En droit international coutumier, l’immunité personnelle protège les chefs d’État, chefs de gouvernement et ministres des affaires étrangères en exercice. Elle interdit toute poursuite pénale par une juridiction nationale, quels que soient les actes reprochés, qu’ils soient commis à titre privé ou officiel.
Cette immunité se fonde sur le principe d’égalité souveraine des États, précisé notamment par la Résolution 2625 (XXV) de l’ONU et par la jurisprudence de la CIJ.
Une immunité temporaire mais absolue devant les juridictions nationales
La Cour de cassation confirme que cette immunité est absolue et doit être examinée d’office par le juge. Elle protège même contre les poursuites pour les crimes les plus graves (tels que les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre), tant que l’intéressé est en fonction.
L’affaire du 25 juillet 2025 : retour sur la décision de la Cour de cassation
Contexte : plainte pour attaques chimiques en Syrie
En 2021, une plainte a été déposée par une victime franco-syrienne, concernant des attaques chimiques menées en Syrie en août 2013. L’enquête a conduit à l’émission, en novembre 2023, d’un mandat d’arrêt contre le président syrien en exercice au moment des faits. Il est soupçonné de complicité de crimes contre l’humanité.
La question de l’immunité soumise à la Cour
La chambre de l’instruction avait estimé que les actes incriminés ne relevaient pas des fonctions normales d’un chef d’État et ne bénéficiaient donc pas de l’immunité. Cette position a été censurée par la Cour de cassation.
La position de la Cour de cassation
Dans son arrêt du 25 juillet 2025, la Cour de cassation rappelle que :
- le droit international coutumier ne prévoit aucune exception à l’immunité personnelle pour les crimes internationaux ;
- l’immunité personnelle couvre tous les actes commis pendant le mandat, qu’ils soient privés ou officiels ;
- la reconnaissance (ou non) d’un gouvernement par la France n’a aucun effet sur l’existence de cette immunité ;
- la perte de la qualité de chef d’État ne rétroagit pas : la régularité d’un mandat d’arrêt s’apprécie au moment de sa délivrance.
Par conséquent, la Cour annule le mandat d’arrêt en raison de la violation de l’immunité personnelle, mais rappelle que cette protection n’est que temporaire. Ainsi, le président en question n’étant plus en exercice, un nouveau mandat d’arrêt peut être émis.
Quels enseignements tirer pour le droit pénal international ?
L’immunité n’est pas l’impunité
La Cour souligne que l’immunité personnelle n’exonère pas de responsabilité pénale. Elle empêche seulement les juridictions nationales étrangères d’agir tant que l’intéressé est en fonction. Après son mandat, l’ex-chef d’État peut être poursuivi, notamment pour des crimes internationaux (crimes contre l’humanité, crimes de guerre, génocide).
Rôle des juridictions internationales
Les chefs d’État en exercice peuvent toujours être poursuivis par des tribunaux pénaux internationaux compétents (ex : CPI), sous réserve que leur État soit partie au Statut de Rome.