Le 26 juin 2025, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu un arrêt dans l’affaire Seydi et autres contre France. Cette décision porte sur les contrôles d’identité qualifiés de discriminatoires – ou « contrôles au faciès » – subis par six ressortissants français. En jeu : le respect de la vie privée, la lutte contre la discrimination raciale et l’effectivité des recours en justice. Cet article analyse en détail les faits, les griefs des requérants, la décision de la Cour et ses implications pour le droit français.
Les faits à l’origine de l’affaire Seydi et autres contre France
Les six requérants – MM. Seydi, Niane, Abdillahi, Touil, Dif et Kaouah – ont tous été soumis à des contrôles d’identité entre 2011 et 2012, dans différents contextes urbains (Saint-Ouen, Lille, Vaulx-en-Velin, Besançon, etc.). Ces contrôles reposaient sur diverses dispositions de l’article 78-2 du Code de procédure pénale. Ils dénoncent une discrimination fondée sur leur origine, dans un contexte de suspicion systématique visant des personnes perçues comme noires ou arabes.
Des contrôles répétés et injustifiés
Les requérants affirment avoir été ciblés uniquement en raison de leur apparence. Le cas de M. Touil, contrôlé trois fois en dix jours, dont une fois sans base légale claire, illustre l’accumulation et le caractère arbitraire de ces contrôles selon le requérant.
Les griefs soulevés devant la CEDH : contrôle au faciès et absence de recours
Devant la CEDH, les requérants ont invoqué trois violations majeures :
- Article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (respect de la vie privée),
- Article 13 (droit à un recours effectif),
- Absence de traçabilité des contrôles rendant toute contestation impossible.
Le défi de la preuve en matière de discrimination
Les juridictions françaises ont reconnu l’absence de traçabilité des contrôles, ce qui complique toute démonstration de discrimination. Malgré cela, les juges ont exigé des faisceaux d’indices graves, précis et concordants – une exigence que seul le cas de M. Touil a réussi à remplir.
Analyse de la CEDH dans l’arrêt Seydi et autres contre France
Volet procédural : les juges français ont-ils bien instruit les plaintes ?
La Cour a estimé que les juridictions françaises ont correctement examiné les allégations des requérants, en adaptant les exigences probatoires aux difficultés spécifiques des affaires de discrimination. Elle a jugé qu’il n’y avait pas eu violation procédurale de l’article 14 combiné avec l’article 8.
Volet matériel : preuve d’une discrimination pour un seul requérant
Pour cinq des six requérants, la CEDH n’a pas relevé d’éléments suffisants pour établir une discrimination. En revanche, pour M. Karim Touil, la Cour a constaté une violation de l’article 14 combiné avec l’article 8 : trois contrôles rapprochés dans le temps, absence de base légale pour l’un d’eux et des comportements policiers inappropriés ont constitué un faisceau d’indices sérieux. Le gouvernement n’a pas réussi à justifier objectivement ces mesures.
Article 13 : un recours effectif jugé conforme malgré les limites du système
Bien que la France n’impose pas la traçabilité des contrôles, la CEDH a considéré que les requérants ont pu accéder à un juge, faire valoir leurs arguments et bénéficier d’une procédure équitable. Aucune violation de l’article 13 combiné avec l’article 14 n’a donc été retenue.
Quels enseignements tirer de l’arrêt CEDH Seydi et autres contre France ?
La décision rappelle que, même en l’absence de système de traçabilité, la France doit garantir un cadre effectif de lutte contre les contrôles discriminatoires. Elle reconnaît pour la première fois dans cette affaire une violation avérée pour contrôle discriminatoire.
Résumé des points clés de l’arrêt Seydi et autres contre France
- Saisine de la CEDH à la suite de contrôles d’identité jugés discriminatoires par les requérants.
- Violation constatée uniquement pour M. Touil, en raison d’un faisceau d’indices concordants.
- Aucune violation pour les cinq autres requérants : absence de preuve suffisante.
- Pas de défaut de recours effectif selon la CEDH, malgré les lacunes du système français.
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