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Accord UE-Mercosur : décryptage d’un partenariat économique sous tension

En 2019, l’Union européenne (UE) et le Mercosur ont conclu un accord d’association visant à créer une vaste zone de libre-échange entre les deux blocs.

Cet accord, qui marque l’aboutissement de 25 ans de négociations, est aujourd’hui au cœur d’intenses débats en Europe. Entre espoirs économiques et critiques environnementales, ce partenariat soulève des questions cruciales pour l’avenir des relations commerciales entre ces deux régions.

Qu’est-ce que le Mercosur ?

Créé par le traité d’Asunción en 1991, le Mercosur (marché commun du Sud) regroupe plusieurs pays d’Amérique du Sud : l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay, le Paraguay (le Venezuela est suspendu depuis 2017) et, depuis 2023, la Bolivie. Avec des membres associés comme le Chili et la Colombie, le Mercosur représente une force économique majeure, concentrant plus de 80 % du PIB sud-américain et se plaçant au quatrième rang des blocs commerciaux mondiaux.

Ce partenariat repose sur trois principes fondamentaux qui sont la libre circulation des biens et des services, l’adoption de politiques commerciales communes envers les États tiers et la coordination des politiques économiques dans des secteurs clés comme l’agriculture et l’industrie.

Accord Mercosur : un accord de libre-échange aux multiples volets

L’accord UE-Mercosur, signé le 28 juin 2019, s’inscrit dans un contexte d’association multiple et large regroupant un dialogue politique et une coopération renforcée entre les deux régions. Si les aspects politiques et coopératifs suscitent peu de controverse, le volet commercial divise profondément.

Cet accord, qui pourrait concerner près de 800 millions de personnes avec un volume d’échanges de 40 à 45 milliards d’euros, vise à :

  • réduire les barrières tarifaires pour faciliter les exportations européennes vers l’Amérique du Sud ;
  • ouvrir les marchés publics du Mercosur aux entreprises européennes ;
  • encourager des échanges où les produits industriels européens seraient échangés contre des produits agricoles sud-américains (« viandes contre voitures »).

Cependant, l’impact potentiel sur les secteurs agricoles européens, notamment la viande bovine, suscite des inquiétudes.

Accord Mercosur : les controverses autour de l’accord

Dès son annonce, l’accord a été critiqué par plusieurs États membres de l’UE, notamment la France, l’Allemagne et l’Irlande. Ces critiques se concentrent sur trois aspects principaux.

Un rapport de 2020, dirigé par l’économiste Stefan Ambec, met en garde contre une augmentation de la déforestation et des émissions de gaz à effet de serre. La hausse des exportations sud-américaines de viande bovine pourrait accélérer la déforestation de 5 % par an dans les six années suivant la ratification.

Les normes de production des pays du Mercosur diffèrent significativement de celles de l’UE, notamment en matière de résidus chimiques dans la viande bovine.

Les filières agricoles européennes, en particulier la viande bovine et le sucre, pourraient être fragilisées par la concurrence accrue. En revanche, certains secteurs, comme le vin, les spiritueux ou le fromage, pourraient bénéficier de nouvelles opportunités.

L’accord pourrait renforcer l’approvisionnement européen en matières premières stratégiques, essentielles à la transition écologique, comme le lithium, le cobalt ou le graphite.

Pourquoi la France s’oppose-t-elle à l’accord avec le Mercosur ?

En France, l’opposition à cet accord transcende les clivages politiques. Parlementaires, agriculteurs, écologistes et associations de défense des consommateurs s’accordent à dire que le texte actuel ne répond pas aux critères environnementaux, sanitaires et sociaux fixés par l’Assemblée nationale.

Le gouvernement français réclame des « clauses miroir » imposant des normes équivalentes sur les produits échangés et des engagements contraignants en matière de protection de l’environnement. Pour le moment, la Commission européenne ne semble pas prête à intégrer ces modifications.

Quelles perspectives pour l’avenir ?

La ratification de l’accord dépend d’un fragile équilibre politique entre les États membres de l’UE. Si certains pays comme l’Allemagne et l’Espagne poussent dans le sens d’une adoption rapide pour stimuler la croissance, d’autres, comme la France, y restent fermement opposés.

Deux scénarios sont envisageables. Une ratification complète nécessite l’unanimité des 27 pays de l’UE et leur approbation parlementaire. Sinon, une scission de l’accord en deux volets (coopération et commerce). Cette séparation faciliterait une adoption de la partie commerciale à la majorité qualifiée, privant ainsi certains États, comme la France, de leur droit de veto.

Résumé des points clés

  • Le Mercosur est un bloc économique sud-américain majeur, regroupant notamment le Brésil et l’Argentine.
  • L’accord UE-Mercosur vise à créer une vaste zone de libre-échange, avec des retombées économiques potentiellement importantes.
  • Les critiques de cet accord portent sur les impacts environnementaux, sanitaires et agricoles, notamment le risque accru de déforestation.
  • La France exige des modifications pour garantir le respect des normes environnementales et sanitaires européennes.
  • L’avenir de l’accord reste incertain, avec des divergences entre les États membres de l’UE sur sa ratification.

Cet accord, s’il est ratifié, pourrait transformer les relations commerciales entre l’Europe et l’Amérique du Sud, mais les défis qu’il soulève restent colossaux. La question demeure : croissance économique ou protection des normes environnementales ?

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